Généralités et organisation de notre pèlerinage de Shikoku

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Shikoku Henro, késako ?

Présentation des 88 temples du pèlerinage crée par l'auteur du blog suivant

Shikoku Henro est un pélerinage circulaire de 88 temples d'environ 1200km dédié à Kobo Daishi fondateur du bouddhisme shingon (= parole de vérité). Au Japon, il y a 2 principales religions, le shintoisme (animiste) et le bouddhisme. Le shintoisme est la religion ancestrale du Japon alors que le bouddhisme provenant de la Chine et de la Corée est arrivé au Vième siècle. Cette dernière est alors devenue rapidement la religion d'état du pays. Néanmoins elle cohabite avec le shintoisme donnant lieu à une association des deux pour aboutir à de nombreux syncrétismes (incorporation d'éléments shinto au bouddhisme et vice-versa). On trouve souvent un sanctuaire shinto dans l'enceinte d'un temple ou l'inverse, les japonais pratiquant couramment les deux religions.

Dans le bouddhisme japonais, il y a 13 écoles, ou différents groupes de pensée principaux apparus au fil des époques. L'une d'elles, le bouddhisme shingon, arrive au Japon en 835 grâce au moine japonais Kukai (Kōbō Daishi). A son retour de Chine, il enseigne dans son pays cette nouvelle doctrine dite ésotérique où les rituels, la méditation et les mantras sont nécessaires pour accéder à l'éveil.

Il y a beaucoup à dire sur ce sujet qu'on est loin de maîtriser en détail, nous vous invitons à vous documenter davantage pour approfondir le sujet !

Quelques notions à connaître pour le pélerinage :

 - Henro : nom donné aux pèlerins au Japon. Pour s'adresser à vous, la formule polie que vous entendrez plutôt est « O-henro-san »

- Henro korogashi : « là où le henro tombe », nom donné aux ascensions difficiles du pèlerinage

- Kōbō Daishi : titre posthume de Kukai  (qui signife, en gros, "le grand maître qui répand le dharma = l'enseignement bouddhique")

- Michi no eki : aires de repos en bord de route très communes où l'on trouve des boutiques de produits locaux. En tant que henro, il est possible d'y poser la tente à la nuit tombée

- Mikan : mandarines japonaises à la récolte automnale

- Minshuku : chambre d'hôtes à la japonaise, un intermédiaire entre l'hôtel et le ryokan (auberge traditionnelle), ce dernier étant le plus cher

- Onsen/Sento/Rotenburo: bains d'eau chaude, naturelle ou artificielle, on se lave d'abord avant de s'y baigner nu

- Osettai : cadeaux (souvent de la nourriture) donnés aux pélerins par les locaux

- Tsuyado : Hébergement gratuit dans certains temples composé d'une chambre à partager avec les autres pélerins. Il n'y a pas toujours l'électricité.

- Zenkoyado : hébergement offert gratuitement aux henro par des particuliers

La tenue du pélerin : il est facile de trouver sur internet ou dans les livres les différents attributs qui la composent. Dès le premier temple il est possible de tout acheter. Pour notre part, nous avons choisit d'acheter un bâton (kongozue) qui représente Kukai nous guidant (des règles sont à suivre pour son utilisation, à savoir prendre soin du baton avant toi, ne pas l'utiliser sur les ponts pour ne pas déranger Kukai qui est connu pour dormir en dessous), 2 vestes (Oizuru) que nous avons fait tamponner à certains temples), des petits billets de papier (osamefuda) à déposer dans chaque temple (1 dans le hall principal et 1 dans le hall de Kōbō Daishi) et qui peuvent aussi être offerts en remerciement aux donneurs d'osettai. Cette tenue est la marque que vous êtes un pélerins pour les locaux. Néanmoins, la simple vue de votre backpack leur fera vite comprendre ce que vous faites (surtout dans la campagne non touristique).

Le pèlerinage, même en étant non croyant est un état d'esprit basé sur le respect des autres et de la nature qui nous entoure. C'est un chemin spirituel unique à tous. Voici les préceptes traditionnels à suivre lorsqu'on souhaite faire le pélerinage : 

1. Ne pas tuer
2. Ne pas voler
3. Ne pas commettre d 'adultère
4. Ne pas mentir
5. Ne pas exagérer
6. Ne pas dire du mal des autres
7. Ne pas manquer à sa parole
8. Ne pas être envieux
9. Ne pas se mettre en colère
10. Ne pas avoir de mauvaises pensées

Dans chaque temple, il y a une étiquette à suivre bien précise même si tout n'est pas obligatoire. Se référer aux sources situées plus bas pour en savoir plus.

Avant le pélerinage

- A défaut de connaître le japonais, maîtriser un anglais de tous les jours vous simplifiera le voyage. En effet on trouve beaucoup plus d'informations sur internet en anglais qu'en français. Pendant le pèlerinage, même si la plupart des locaux auxquels vous serez confrontés ne comprennent pas l'anglais, ils sont susceptibles de vous répondre si vous posez les bonnes questions. Ce n'est sûrement pas impossible de le faire en ne connaissant que le français, mais bien plus simple et agréable avec l'anglais et le mieux avec le japonais… bien que les japonais eux mêmes avouent avoir parfois du mal à comprendre les personnes âgées de Shikoku !

- Recherche sur google : fichier pdf sur le pèlerinage en anglais (http://henro88map.com/pdf/Henro-ENG.pdf ) En tapant des mots clefs il est tout à fait possible de trouver d'autres sites en anglais ou en français.

- Achat du Shikoku Japan 88 Route Guide : notre bible pendant nos 45 jours. Un petit livre en anglais qui contient des cartes très précises du circuit ainsi qu'une foule d'informations utiles. Nous avons rarement eu des soucis d'orientation en dehors de quelques « trous » inexplicables de plusieurs km (en particulier dans la préfecture de Kochi), car le marquage du chemin est extrêmement complet et varié (autocollants, flèches, petits bonhommes en tenue de pèlerin, stèles de pierre anciennes…). Toute question d'orientation mise à part, cet ouvrage est tout bonnement indispensable pour pouvoir anticiper un minimum. Ainsi vous ne vous jetterez pas dans une portion dépourvue de konbinis la tête baissée et vous pourrez optimiser vos journées de marche à l'avance en fonction du dénivelé des prochains jours et des abris disponibles. Dedans, vous trouverez des informations sur les logements, les restaurants, les onsen, les cabines téléphoniques, les horaires de bus et de train, les dénivelés du parcours, les traditions et les spécialités des villes traversées, mais aussi des informations générales sur les rituels à suivre dans les temples, sur la vie de Kukai et ainsi que sur le bouddhisme ésotérique. Tout est là pour pouvoir pleinement profiter du pèlerinage. Il ne coûte même pas 2000¥, moins de 15€ !

Pendant le pélerinage

- Logement. Nous avons utilisé principalement ces sites :

• Airbnb, agoda, booking

• https://henrohouse.jp/en :Site internet très pratique qui permet de réserver en ligne jusqu'à 13h le jour même et qui regroupe des logements (minshuku, auberge de jeunesse, guest house) faisant des prix pour les pèlerins. Très facile d'utilisation, une fois inscrit il suffit de s'identifier avec son adresse mail.

• http://walkingmylife.weebly.com/lodgings.html : blog d'un ancien pèlerin qui a regroupé les différents logements possibles (payant, gratuit chez les gens ou à la belle étoile). C'est en anglais et il en existe sûrement d'autres sur internet, mais celui-ci nous a tout de suite convaincu, car il synthétise l'expérience de plusieurs années de pèlerinage autour de Shikoku et nous n'avons donc pas pris la peine de chercher plus loin.

• Guide Shikoku Henro 88 route guide : Sur les cartes sont marquées bon nombre de logements avec leur numéro de téléphone ainsi que les huttes pour dormir à la belle étoile ou en tente.

- Communication

• Internet : Nous avons fait le choix de ne pas prendre de pocket wifi mais une simple carte data valable 1 mois de 1,5 gigas au cas où (nous n'aurons finalement pas l'utilité). Le parcours nous fait passer par de nombreux konbinis disposant de la wifi, de plus les rares logements payants où nous avons résidé en disposaient aussi (à l'exception d'un seul minshuku). Avec le guide en poche et la page du blog de walking my life pré-chargée sur le portable on avait un choix de logements amplement suffisant.

• Cabine téléphonique : souvent présente dans les rues, les temples et les gares, c'est très pratique pour réserver un logement. Préparez-vous cependant à bredouiller quelques mots de japonais. Le guide situe un certain nombre de cabines téléphoniques et les affiche les numéros de téléphone des logements suggérés.

- Hygiène

• Toilettes : On en trouve dans tous les temples, gares, konbinis et parcs que vous traverserez. Il n'y en a jamais loin, sauf dans la forêt où il faudra faire entre 2 arbres. Le seul hic est que dans les endroits très ruraux, il y a de fortes chances que ce soient des toilettes dites japonaises traditionnelles (l'équivalent de nos toilettes à la turque).

• Douche : Lorsque vous décidez de voyager à la belle étoile ou de dormir en tsuyado ou zenkonyado, il n'y aura pas de quoi se laver (notre zenkonyado fut une exception). Il faut alors aller dans les sento/onsen indiqués sur le guide et être prêt à vous dispenser de douche pendant plusieurs jours consécutifs. C'est une si belle récompense que de pouvoir dormir sur le parking d'un onsen et d'y aller juste avant de se coucher, le meilleur des sentiments avec en prime le restaurant du onsen souvent peu cher pour finir le délassement.

• Machine à laver : Il y a bon nombre de lavomatiques sur le parcours, aussi indiqués dans le livre et même plein qui ne le sont pas mais faciles à répérer en passant devant (coin laundry コインランドリー en katakana). En 1h-1h30 de pause votre linge est lavé et séché et vous pouvez reprendre votre marche.

- Nourriture

Aucun souci à prévoir, les restaurants, konbinis et supermarchés sont partout sur votre parcours et pour la plupart mentionnés dans le livre. Lorsque les boutiques deviennent rares voire inexistantes le guide vous en avertira, il sera donc facile de prévoir un jour ou deux de réserve.

- Argent

La grande majorité du temps on utilisera le liquide. Aucun problème pour retirer de l'argent avec les konbinis et JP Post mentionnés sur le guide, juste bien prévoir le moment pour ne pas se retrouver en pleine campagne sans argent. A noter que vous ne pourrez pas retirer plus de 100 000 yen à la fois.

- Climat

Le pélerinage s'effectue en général entre mars à novembre. Nous l'avons effectué du 3 novembre au 13 décembre.

• Novembre : temps chaud et ensoleillé, aucun souci pour dormir dehors et la marche est agréable, nous n'avons pas eu de problème avec les moutisques

• Décembre : le froid arrive vite, il devient dur de dormir dans la tente et il est arrivé de geler dehors la nuit. Nous vous déconseillons de finir en cette période (sauf pour les ascètes en puissance)

- Rythme des journées de marche

Lever entre 6h et 6h30, rangement de la tente, petit déjeuner, départ entre 7h30 et 8h, marche et pause quand on veut, fin de la marche au coucher du soleil, mise en place de la tente, dîner et dodo vers 18h30

Après le pélerinage

- Avant le temple 88, il y a le musée du pélerinage où il est possible d'obtenir un certificat de fin de pélerinage à pied.

- Nous avons décider de continuer notre marche jusqu'au temple 1 pour finir notre boucle. Entre le temple 88 et le 1 nous avons trouvé un hébergement à côté de Tokushima (18km du temple 88) où nous nous sommes reposé 3 jours avant de terminer notre périple. 

- Notre récapitulatif de notre périple basé sur le km du livre : (1125km au total dont 792km de marche ; 42 jours du temple 1 au 88)

La fatigue

Pour finir nous voulions faire un petit apparté sur la fatigue de ce pélerinage. Nous avions fait pas mal de randonnée en Europe avant de nous lancer. Nous pensions que ça ferait office de préparation et nous avions tort et raison.

- Le bitume : il représente peut-être 90% du pélerinage. Des chaussures qui amortissent bien sont indispensables car même si les premiers 20km passent bien, rapidement le mal de pied se fait sentir. A la fin du pélerinage Nolwenn a dû changer de chaussures tellement ses semelles étaient devenues fines. On ne s'en rend pas compte à première vue mais quand elle a essayé de nouvelles chaussures (basket/rando) e changement se fait tout de suite sentir pour le mieux. 

- Le poids du sac : Plus vous serez léger mieux ce sera. Le pélerinage se fait en ville et avec ses nombreux lavomatiques vous n'avez pas besoin de vous encombrer si vous venez au Japon uniquement dans ce but. Personnellement nous étions bien trop chargés avec nos backpacks en mode tour du monde. Portant en continu un chargement de 15kg pour Nolwenn et de 30kg pour Alex, nous avons eu des difficultés à tenir nos marches (comme vous pouvez le voir sur le récapitulatif). N'hésitez pas à prendre le minimum (4 à 6kg est le poids conseillé, jusqu'à 10 si vous transportez du matos de camping) sinon vous risquez de vite le regretter sur la route.

- Le temps : lorsqu'il fait beau et chaud tout va bien mais dans la pluie et le froid, tout devient plus difficile et la fatigue vous gagne vite. Ménagez vous et prévoyer des protections contre la pluie et des vêtements chauds lorsque vous vous arrêtez de marcher.

- Faire des pauses : le pélerinage n'est pas une course et ce n'est pas un échec que de prendre les transports si besoin. C'est une épreuve d'endurance !

- Etre mesuré : si vous dormez en tente, vous pouvez dormir pratiquement partout, il ne faut pas se forcer à marcher pour tenir son objectif de marche du jour. Si vous n'avez pas de quoi bivouaquer c'est une autre histoire, à vous de vous organiser pour être sur d'arriver à l'hébergement réservé. Certaines routes sont plus difficiles que ce que l'on pense.

Comme vous pouvez le voir sur le récapitulatif, nous avons vite atteint nos limites car nous n'étions pas habitué à marcher autant de façon régulière. Nous sommes donc décidés dès le début de prendre les transports pour aller plus vite et éviter certains parcours en bord des voies rapides. Nous avons ensuite décidé de nous forcer à marcher sans utiliser les transports pour voir jusqu'où on pourrait aller. Notre deuxième partie de voyage en transports (la fin du pélerinage) est due à l'arrivée de l'hiver, où il devenait difficile de dormir en tente, et à notre grande fatigue. Lorsqu'on ne peut plus se lever le matin à cause des courbatures si fortes qu'il faut plusieurs minutes avant de pouvoir marcher, il est temps de se reposer et de finir le pélerinage. Nous avons mis 1 bon mois pour récuperer de ce pélerinage (fin des courbatures).

C'est difficile mais une expèrience unique à tous les niveaux qu'on conseille à tous les curieux de voyages à la fois extérieurs et intérieurs !